Le géant de Mountain View nous a habitué depuis des années à sortir régulièrement de nouveaux produits qui, pour certains changent radicalement notre pratique du web (Earth, Maps, Picasa,...) et de l'informatique, pour d'autres paraissent tout à fait anodins (Translation, code, ...). Avec la concentration accélérée et surtout la perméabilité de plus en plus importante entre télécom, informatique, web et musique (par exemple), la firme parait moins sure d'elle qu'elle nous y avait habitué. Si nombre de ballons d'essai issus des Google Labs n'ont pas vocation à devenir des produits majeurs, certains échecs (Knol) et tâtonnements laissent penser que Google ne sait plus bien où il va. En outre, certaines rumeurs dont le géant s'est fait le spécialiste tardent à se concrétiser. Alors qu'en est-il, que nous réserve Google dans les mois-années à venir?
[Note: cet article a été en partie rédigé avant la présentation de Chrome OS le jeudi 19 novembre 2009. Le principe de prospective en a été un peu périmé pour certains côtés, bien que les réflexions de fonds restent valables...]
Je vais me baser sur les grands projets annoncés (plus ou moins médiatiquement) et les grandes tendances qui semblent émerger des TIC. Ainsi l'on constate une distinction de plus en plus faible entre le web et le local. Les disques durs sont partout et deviennent inutiles (espaces de stockage en ligne semi-gratuits, multiplication des appareils multimédia dotés d'un stockage flash ou mécanique, synchronisation renforcée des données), les logiciels sont en ligne, le gratuit-libre est désormais aussi performant que le payant pour l'usage grand public. Enfin, les navigateurs tendent à fusionner l'ensemble des usages séparés, de la messagerie à la veille ou la musique et la vidéo en ligne.
Dans ce cadre la dernière grosse sortie de Google, son navigateur Chrome, a fait grand bruit. D'interface très simple, il apporte une fonction de navigation privée inédite et une rapidité qui le place en tête dans les comparatifs. Assez pour entrainer une réaction de Mozilla qui envisage de copier Chrome sur l'interface et l'attribution d'un processus par onglet sur ses prochaines versions (accélérant la vitesse de chargement de chaque onglet au risque de surcharger une session ouverte avec de nombreuses pages...).
L'annonce "légendaire" d'un système d'exploitation (qui s'avère n'être qu'une Debian habillée en Chrome) laisse penser que Google reste une firme visionnaire en pariant sur le tout web: son OS n'est qu'un navigateur étendu gérant le hardware de l'ordinateur et faisant fonctionner des applications web.
L'excellent Korben vient de publier une synthèse très parlante sur la présentation par Google de son "OS". Il en ressort que ceci semble encore une fois un coup d'annonce finalement mineur : Chrome OS ressemble très furieusement au système linux des eepc d'Asus et ne garantit pour l'instant aucune compatibilité matérielle et logicielle. Pas de Bureau, pas de widgets... Rien qui concurrencera un véritable OS malgré les annonces de version PC de bureau. Surtout, alors que se profile un déferlement du tout tactile dans les 10 années à venir, Chrome OS fait le service minimum sans rien anticiper (au risque d'être périmé dès lors que le grand public sera équipé d'écrans tactiles. Google fait beaucoup de com', laisse la communauté bosser et ne révolutionne rien avec son pseudo-OS. La force de Microsoft a toujours été sa grande compatibilité quand Mac et Linux avancent (très) doucement sur la même voie.
L'extension Gmail Drive montre la direction empruntée pour l'OS de Google, en rendant artificielle la distinction entre disque dur local et disque dur en ligne. Idem avec les rumeurs Gdrive, espace de stockage fusionné pour l'ensemble de ses applications Google. Mais pour le côté web-OS, Ubuntu est déjà sur la voie du Cloud-computing avec son stockage en ligne synchronisé Ubuntu One. Les grands fabricants de hardware ne l'attendent pas pour sortir leur propre interface linux (Cf la Freebox ou la Playstation 3). Bref, rien de révolutionnaire, rien qui n'impose de sortir de ses habitudes en continuant d'utiliser certaines applications Google sans pour autant adopter son pseudo-OS.
La seule vraie nouvelle est l'utilisation hors-ligne des applications Google, ce qui signifie tout simplement (et paradoxalement) que le géant du web qui a tout misé sur le online, devient un éditeur d'applications classiques sur le même créneau que OpenOffice, Mozilla ou Microsoft. En sachant que ses applications ne sont pas plus performantes que celles de Sun et de la Mozilla foundation par exemple...
Au final, Chrome OS est une simple fusion de l'ensemble des applications de Google (ou plutôt une juxtaposition). Une sorte de Google-Pack géant. Il ne crée aucunement un nouveau secteur mais sert (comme pour la navigateur Chrome) d'aiguillon permettant à la communauté du Libre de faire progresser rapidement ses outils.
Les dernières infos de Google donnent quelques pistes pour le reste:
- les tests en cours sur Google Wave (qui ressemble pour l'instant surtout à un super Gmail) le rachat de Gizmo5, laissent présager un prochain service de messagerie/chat/Webconf+VoIP qui manquait cruellement dans la suite Google. Si c'était le cas, Wave pourrait réellement prendre sa place en écrasant un projet Mozilla Raindrop bien plus modeste mais qui semble mieux pensé pour le moment (j'y reviendrai dans le second billet). Et surtout devenir un concurrent très sérieux pour détrôner Skype.
- les améliorations (test d'OCR) et déclarations sur GoogleDocs indiquent un passage de cap qui pourrait se voir concrétisé avec Chrome OS.
- Le GPS Google Maps intégré aux netbook Androïd (qui deviendront Chrome OS) est une bonne nouvelle mais se contente de s'engouffrer dans un secteur en expansion. L'ex-Fennec de Mozilla (désormais Firefox Mobile) semble plus innovant avec son accéléromètre...
Pour résumer tout ça:
- Google Wave sera un Skype évolué fusionnant tous les moyens de communication dans une même appli (probablement avec une version installable sur le Bureau de l'ordinateur). C'est le projet le plus intéressant à l'heure actuelle.
- Google OS ressemble à un pétard mouillé et précipité qui ne détrônera ni Ubuntu ni les Linux-OS des netbook.
- Google documents sortira probablement une version offline performante dont les innovations (OCR) seront reprises par OpenOffice.
et maintenant...?
Quid de GoogleEarth, qui continue son bonhomme de chemin sans grosse com'? Je ne sais pas si je suis le seul mais depuis plusieurs années je me demande quand Google décidera d'utiliser son mastodonte comme véritable navigateur. Tout est en place: l'installation sur poste, l'insertion des informations Google Maps (circulation, panomino, Street View), ouverture aux développeurs, le GPS, la géolocalisation Picasa, l'existence de Chrome,... Il ne manque plus qu'une navigation plus facile (gérant le tactile?) pour lancer une véritable révolution. Mais Google est-il assez visionnaire pour cela? Il semble malheureusement qu'il réussisse mieux par l'ajout discret de fonctionnalités à ses outils déjà existant (détection des visages dans Picasa, Street View dans Gmaps,...) que par le lancement de nouveaux produits.
Imaginez un Chrome-GoogleEarth et un GWave gérant la visioconf et le partage d'écran en parallèle, la véritable révolution serait là!
Pour info, le site de CNN s'est amusé à un exercice de prospective similaire en 2006.
[Note: cet article a été en partie rédigé avant la présentation de Chrome OS le jeudi 19 novembre 2009. Le principe de prospective en a été un peu périmé pour certains côtés, bien que les réflexions de fonds restent valables...]
Je vais me baser sur les grands projets annoncés (plus ou moins médiatiquement) et les grandes tendances qui semblent émerger des TIC. Ainsi l'on constate une distinction de plus en plus faible entre le web et le local. Les disques durs sont partout et deviennent inutiles (espaces de stockage en ligne semi-gratuits, multiplication des appareils multimédia dotés d'un stockage flash ou mécanique, synchronisation renforcée des données), les logiciels sont en ligne, le gratuit-libre est désormais aussi performant que le payant pour l'usage grand public. Enfin, les navigateurs tendent à fusionner l'ensemble des usages séparés, de la messagerie à la veille ou la musique et la vidéo en ligne.
Dans ce cadre la dernière grosse sortie de Google, son navigateur Chrome, a fait grand bruit. D'interface très simple, il apporte une fonction de navigation privée inédite et une rapidité qui le place en tête dans les comparatifs. Assez pour entrainer une réaction de Mozilla qui envisage de copier Chrome sur l'interface et l'attribution d'un processus par onglet sur ses prochaines versions (accélérant la vitesse de chargement de chaque onglet au risque de surcharger une session ouverte avec de nombreuses pages...).
L'annonce "légendaire" d'un système d'exploitation (qui s'avère n'être qu'une Debian habillée en Chrome) laisse penser que Google reste une firme visionnaire en pariant sur le tout web: son OS n'est qu'un navigateur étendu gérant le hardware de l'ordinateur et faisant fonctionner des applications web.
L'excellent Korben vient de publier une synthèse très parlante sur la présentation par Google de son "OS". Il en ressort que ceci semble encore une fois un coup d'annonce finalement mineur : Chrome OS ressemble très furieusement au système linux des eepc d'Asus et ne garantit pour l'instant aucune compatibilité matérielle et logicielle. Pas de Bureau, pas de widgets... Rien qui concurrencera un véritable OS malgré les annonces de version PC de bureau. Surtout, alors que se profile un déferlement du tout tactile dans les 10 années à venir, Chrome OS fait le service minimum sans rien anticiper (au risque d'être périmé dès lors que le grand public sera équipé d'écrans tactiles. Google fait beaucoup de com', laisse la communauté bosser et ne révolutionne rien avec son pseudo-OS. La force de Microsoft a toujours été sa grande compatibilité quand Mac et Linux avancent (très) doucement sur la même voie.
L'extension Gmail Drive montre la direction empruntée pour l'OS de Google, en rendant artificielle la distinction entre disque dur local et disque dur en ligne. Idem avec les rumeurs Gdrive, espace de stockage fusionné pour l'ensemble de ses applications Google. Mais pour le côté web-OS, Ubuntu est déjà sur la voie du Cloud-computing avec son stockage en ligne synchronisé Ubuntu One. Les grands fabricants de hardware ne l'attendent pas pour sortir leur propre interface linux (Cf la Freebox ou la Playstation 3). Bref, rien de révolutionnaire, rien qui n'impose de sortir de ses habitudes en continuant d'utiliser certaines applications Google sans pour autant adopter son pseudo-OS.
La seule vraie nouvelle est l'utilisation hors-ligne des applications Google, ce qui signifie tout simplement (et paradoxalement) que le géant du web qui a tout misé sur le online, devient un éditeur d'applications classiques sur le même créneau que OpenOffice, Mozilla ou Microsoft. En sachant que ses applications ne sont pas plus performantes que celles de Sun et de la Mozilla foundation par exemple...
Au final, Chrome OS est une simple fusion de l'ensemble des applications de Google (ou plutôt une juxtaposition). Une sorte de Google-Pack géant. Il ne crée aucunement un nouveau secteur mais sert (comme pour la navigateur Chrome) d'aiguillon permettant à la communauté du Libre de faire progresser rapidement ses outils.
Les dernières infos de Google donnent quelques pistes pour le reste:
- les tests en cours sur Google Wave (qui ressemble pour l'instant surtout à un super Gmail) le rachat de Gizmo5, laissent présager un prochain service de messagerie/chat/Webconf+VoIP qui manquait cruellement dans la suite Google. Si c'était le cas, Wave pourrait réellement prendre sa place en écrasant un projet Mozilla Raindrop bien plus modeste mais qui semble mieux pensé pour le moment (j'y reviendrai dans le second billet). Et surtout devenir un concurrent très sérieux pour détrôner Skype.
- les améliorations (test d'OCR) et déclarations sur GoogleDocs indiquent un passage de cap qui pourrait se voir concrétisé avec Chrome OS.
- Le GPS Google Maps intégré aux netbook Androïd (qui deviendront Chrome OS) est une bonne nouvelle mais se contente de s'engouffrer dans un secteur en expansion. L'ex-Fennec de Mozilla (désormais Firefox Mobile) semble plus innovant avec son accéléromètre...
Pour résumer tout ça:
- Google Wave sera un Skype évolué fusionnant tous les moyens de communication dans une même appli (probablement avec une version installable sur le Bureau de l'ordinateur). C'est le projet le plus intéressant à l'heure actuelle.
- Google OS ressemble à un pétard mouillé et précipité qui ne détrônera ni Ubuntu ni les Linux-OS des netbook.
- Google documents sortira probablement une version offline performante dont les innovations (OCR) seront reprises par OpenOffice.
et maintenant...?
Quid de GoogleEarth, qui continue son bonhomme de chemin sans grosse com'? Je ne sais pas si je suis le seul mais depuis plusieurs années je me demande quand Google décidera d'utiliser son mastodonte comme véritable navigateur. Tout est en place: l'installation sur poste, l'insertion des informations Google Maps (circulation, panomino, Street View), ouverture aux développeurs, le GPS, la géolocalisation Picasa, l'existence de Chrome,... Il ne manque plus qu'une navigation plus facile (gérant le tactile?) pour lancer une véritable révolution. Mais Google est-il assez visionnaire pour cela? Il semble malheureusement qu'il réussisse mieux par l'ajout discret de fonctionnalités à ses outils déjà existant (détection des visages dans Picasa, Street View dans Gmaps,...) que par le lancement de nouveaux produits.
Imaginez un Chrome-GoogleEarth et un GWave gérant la visioconf et le partage d'écran en parallèle, la véritable révolution serait là!
Pour info, le site de CNN s'est amusé à un exercice de prospective similaire en 2006.
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